Vol au dessus d'un nid de coucou

Le suspens a assez duré. Et je suis maintenant en mesure de vous parler de ce fameux projet spécial sur lequel je planche depuis maintenant plus de 2 mois. Comme je l’avais mentionné plus tôt dans un précédent article, il s’agit d’un bidule avec lequel nous pourrons faire de la photo et de la vidéo… aérienne. Roulement de tambour!



En fait, il s’agit d’un drone (que les Américains appellent UAV : Unmanned aerial vehicule) que j’ai construit moi-même de A à Z, en passant par toute la gamme des émotions soit dit en passant. Une aventure extraordinaire, un challenge sans précédent. Des heures de plaisir (et de crainte) mais aussi de longues nuits blanches entrecoupées de cauchemars récurrents.

«Ça ne volera jamais! ai-je souvent répété à Martine dans les moments de doute. C’est impossible! Ça défie toutes les lois de l’aéronautique, de l’aérospatiale, de la Nasa, de la conquête de la Lune et tout le reste!»

Ce à quoi elle répondait toujours : mais oui ça va voler. Sois patient. Une étape à la fois.

Je vous ai déjà dit que j’étais loin d’être patient? Chose certaine, ce projet l’aura mise à rude épreuve, ma patience.

Historique

Or donc, l’objet en question se nomme un tricopter. C’est comme un hélicoptère mais avec trois hélices –d’où le tri dans copter. Son inventeur se nomme David Quelque Chose, un Suédois dans la vingtaine tellement intelligent et doué qu’il pourrait faire voler une brique. Peut-être même deux. C’est de lui que je me suis inspiré pour fabriquer MON tricopter. Et est-ce qu’il vole, Yves, TON tricopter à TOI? Réponse : pas encore. Mais ça progresse.

Je vous ferai grâce de tous les étapes ayant mené à sa fabrication. Car outre commander les pièces électroniques en provenance de Hong Kong, le plus difficile fut de trouver les matériaux pour la construction du châssis de fibre de verre. À cette échelle, il ne faut pas oublier que le mot d’ordre est légèreté des matériaux. De plus, il me fallait garder en tête que l’appareil devait être assez léger et puissant pour embarquer une caméra à son bord. Déjà, à cette étape, j’étais envahi par le doute. Volera-t-il? Je ne sais pas. Sera-t-il assez puissant ne serait-ce que pour soulever son propre poids? Là encore je ne sais pas. Et pour la caméra? Oublions la caméra pour l’instant…

À la conquête du ciel

Les premiers essais se sont déroulés la semaine dernière, après une course folle de travail de 18 heures en ligne (dont une nuit jusqu’à 3 heures du matin) afin de peaufiner le tout pour le vol inaugural. J’étais littéralement sur un nuage.

Histoire d’être aux premières loges, j’ai choisi le salon de notre maison comme base de lancement du tricopter. Mauvaise idée… Premièrement, le tricopter se doit d’être convenablement programmé avant de voler… Deuxièmement, c’est loin d’être un jouet -surtout lorsque équipé de 3 hélices… Et troisièmement : la bête est monstrueusement puissante!!!

Maintenant, fermez les yeux et imaginez… Je suis confortablement installé sur le canapé, télécommande en main et tricopter au milieu de la pièce. Les moteurs se mettent en marche. La tension est palpable. Le chien, qui d’ordinaire ferait pisser le diable dans son pantalon, s’enfuit à l’étage se réfugier dans une chambre, derrière un garde-robe, sous le lit et avec une couverture sur la tête. Les moteurs vrombissent de plus en plus, j’ai un sourire niais imprimé sur le visage et mon rythme cardiaque frôle les 200 battements par minute. Ça y est, on y est presque, le tricopter va doucement quitter le sol et se mettre en stationnaire à un mètre d’altitude, dans toute la grâce de l’oiseau qui quitte le nid. Ça aurait été le scénario idéal… Mais ne vous avais-je pas dit que le tricopter se devait d’être convenablement programmé avant de voler?

En une fraction de seconde (et sans que je touche à aucun bouton, je le jure) la bête s’est ni plus ni moins propulsée jusqu’à la cuisine, dans un fracas infernal avant de se retourner sur le dos, imprimant au passage une de ses hélices dans le plancher de bois. J’étais aux anges. La preuve que j’attendais depuis des semaines était enfin là devant moi. Un tricopter peut voler.

À la deuxième conquête du ciel

Les essais suivants eurent lieu quelques jours plus tard, en extérieur cette fois, avec des résultats plus ou moins probants. Là encore, j’ai appris une chose importante en rapport avec cet engin volant. Je vous explique. Point de vue programmation, j’ai fait beaucoup de progrès. J’ai ajouté de nouveaux paramètres de vol à la manette de contrôle et je croyais avoir les bons réglages.

J’ai donc installé le tricopter au sol, démarrer les moteurs et l’ai fait se soulever à quelques centimètres du sol. Le seul problème qui ne me permettait pas de poursuivre mes tests était le vent. Il ventait beaucoup cette journée-là. J’ai donc eu l’idée de prendre le tricopter dans ma main et de le déplacer à l’intérieur du garage. Très mauvaise idée. Même si les hélices étaient à l’arrêt complet (je ne suis pas idiot tout de même) le tricopter possède une certaine forme d’intelligence. En le déplaçant ainsi, les gyroscopes, qui ont pour fonction de déterminer si l’appareil est stable ou non lorsqu’il est dans les airs, ont décidé de passer en mode panique. Et le mode panique, pour eux, signifie de dire aux trois moteurs : Écoutez tous! On va se planter, alors chacun met toute la gomme pour se sortir de cette merde! Compris tout le monde? Alors on met le paquet! Et les moteurs on mis le paquet. Et moi je tenais le tricopter à bout de bras…

Les gyros en question (en bleu sur la photo).  Ils ont l'air sage mais ne vous y fiez pas...

Comment pourrais-je décrire cette sensation. Permettez-moi d’être un peu vulgaire, l’instant d’une courte phrase. Pour résumé, c’est comme si j’avais rentré ma main dans le cul d’un chat et que j’essayais de le retenir alors que lui tentait de s’enfuir toutes griffes sorties. Désolé, mais ça ressemblait à ça. Je me suis toujours méfié des chats. J’aurais dû y penser.

Une partie du chat en question

Bilan : un peu de casse du côté du tricopter. Une hélice, le bras du moteur de gauche et mon bras à moi. Le bout de l’hélice cassé est venue se planter dans les parties plus tendres… C’est ça la conquête du ciel. Beaucoup d’imprévus!

Difficile à croire, mais ça vole!

Au moment d’écrire ces lignes, le tricopter est en mode repos. Quelques modifications à apporter (la solidité des bras surtout) et de nouveaux réglages et beaucoup de peaufinage. Prochain test de vol ce week end si la température le permet. Cette fois, vous aurez droit à un vidéo. On se dit bonne chance et surtout, bon vol!

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